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19 novembre 2008 3 19 /11 /novembre /2008 00:00

   
  Tu évoque l'aube au moment où j'ypense. Ne crains rien, le jour fermera l'oeil et ne se lèvera qu'après le fin de notre rêve.
  L'aube, ce moment que nous passons dans les ventres de nos mères quelques jours avant de voir le jour. 
  L'aube, ce souvenir immédiat auquel on aime revenir quand nous repousse et nous blesse l'exagéré éclat matinal.
  L'aube, cet abandon du champ de bataille par la nuit vaincue qui reviendra le soir, fortifiée, enterrer le soleil.
  L'aube, premiers chants des oiseaux; rosée de cristal sur les herbes, retournements machinaux des paresseux dans leurs lits défaits
  Tu évoques l’aube…à quelques heures de l’aube. Ne crains rien, nous enfermerons en nous le soleil pour qu’il fasse toujours nuit autour de nous…

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1 octobre 2008 3 01 /10 /octobre /2008 00:00

Aid moubarek à tous les bloggeurs et les lecteurs de dzblog.

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8 juillet 2008 2 08 /07 /juillet /2008 00:00

images_44_.jpg     Quand nous commençons à croire que l’espoir s’éloigne et que nous gagne la certitude de ne jamais pouvoir réaliser nos aspirations, notre vie prend l’image d’un champ d’errance sans paysage ; une ile de sable que l’eau submerge impitoyablement jour après jour.

     Le champ ne cessera de se rétrécir, nos moyens de défense nous trahissent.  Seul , penserons-nous un coup de chance ou une providence  nous sauveraient . Mais il est rare que le hasard se manifeste pour arranger de telles situations, il risque de compromettre les lois qui le font intervenir au moment où l’on attend le moins. Il risque de se retrouver esclave de nos souhaits.

     Le cercle continue donc, fatalement, à se rétrécir jusqu’à nous anéantir, nous faire pénétrer en nous même, comme pour  libérer nos âmes. Est-ce le salut ? Non. L’adversité nous poursuit jusqu’aux confins de  l’intime, nous déloge de notre refuge. Les larmes aux yeux, des proches accourent, foncent dans l’eau, nous tirent  de notre noyade et insufflent en nous le désir de tenter la vie encore une fois.

     Je dégaine donc  mon arme pour continuer à avancer, mais il me semble qu’il est plus facile de la retourner contre moi-même que de la pointer sur mon adversaire ; un ennemi de taille : un monde qui s’animalise. Un adversaire qui fera de mon honnêteté  un délicieux plat pour ses tricheurs. Il fera de mon amour une moquerie pour ses pierres de glaces que renferment des poitrines alléchantes  par leur robustesse et leurs rondeurs.  Il fera de mon sourire une faiblesse dont ses tyrans se nourrissent et puisent  leur force. Une bataille perdue d’avance.

     Cependant, je continuerai à vivoter.  Car il me semble que le désespoir totale n’existe pas, il persiste toujours  quelque part en nous  un vouloir de lutter encore. Je serai, me console-je, du bon coté de l’immense pièce de monnaie que Dieu mettra à la fin dans l’Enfer.  J’assisterai de mon coté face aux tortures des gens qui m’auront fait souffrir.  Le feu ne m’atteindra qu’après leur disparition et me dévorera à l’abri de leurs yeux crevés. C’est cela mon paradis.

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20 juin 2008 5 20 /06 /juin /2008 00:00

J’ai pris ce matin le sentier
Le sentier jadis inconnu par la garde
Le sentier qui maintes fois me mena
A ta prairie cette tendre verdure
Le sentier qui serpentait
Tabous et interdits
Qui évitait le mauvais œil
Les langues tranchantes
Le sentier complice
De nos cœurs déboussolés
De notre noble folie
 
                 Il a pris herbes et épines
                 Et mousse a couvert
                 Ses pierres plates et lisses
                 Qui nous servaient
                 Sans nulle avarice
                 La tiédeur accumulée le jour
 
Une fleur a poussé
A l’endroit où nos cœurs roucoulaient
Sous le regard timide
De nos lèvres muettes
Une fleur plus douce à caresser
D’une main hésitante
Et à peine osée
              Plus éclatante
              Plus attirante
              Que tout qui n’est pas toi.

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8 juin 2008 7 08 /06 /juin /2008 00:00

 Voici l'endroit où une partie de la falaise s'est écroulée lors du seisme du 7 juin 2008 à Oran. Un pêcheur est sous les décombres.

 

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2 juin 2008 1 02 /06 /juin /2008 00:00

    C’est la première fois que je t’écris. Je ne considère pas que les poèmes que j’ai t’envoyés comme des messages. Ces textes étaient écrits avant que je ne fasse ta « connaissance », et ne peuvent donc contenir les effets de ton admirable personne. Je me reproche sévèrement de te les avoir transmis sans une introduction, ni conclusion, sans quelques phrases qui te sont personnellement destinées. C’est impoli de ma part, et je suis certain que tu as éprouvé le sentiment de la chose inachevée. J’ai cependant aussi la certitude que tu sais pardonner.

 
     Il est minuit. C’est à partir de ce moment là qu’il m’est permis de pousser la porte de mon jardin imaginaire et y pénétrer. Et c’est d’ici, de cet endroit où tout est magique que je préfère m’adresser à une personne aussi aimable que toi. J’y vois une nouvelle plante pousser, belle comme une Offrande de Dieu. J’en prendrai soin…Je ne peux continuer sans te remercier pour le temps que tu m’accordes sur le « chat ». Je crois que nous avons tant besoin d’échanger nos idées et nos avis sur différents sujets. Et j’aime ta façon de voir les choses. Tu es si sûre de toi. Catégorique. La société où tu vis y est certainement pour quelque chose. On peut planifier, calculer. Le risque de se tromper reste dans des proportions raisonnables. Et s’il te semble que mes idées sont un peu confuses ou incomprises sache que je suis le produit d’une société que tu as connue et dont tu as souffert peut être de son incompréhension et son intolérance. Je vis en solitaire…
 
   Personne ne comprendra mes idées ou mes sentiments. La vie est dans l’esprit des gens tout autre. Ils se battent pour nourrir leurs corps. Vas-y leur dire que tu as publié un roman. La question du plus instruit est : Combien on t’a donné? Tu n’as qu’à te taire. Il y a longtemps que je me suis tu. Et sais-tu pourquoi je te raconte cela ? C’est pour te dire qu’il ne faut pas attendre de moi grande chose sur le plan intellectuel. Je ne suis pas très instruit. Avec l’arrivée du Net un espoir renaît en moi. Cela m’a permis déjà de m’entretenir avec beaucoup de gens, et c’est très important. J’ai appris des choses bonnes, d’autres mauvaises…Et la vie est ainsi, le bien et le mal s’y combinent. L’essentiel est la communication. Et tu fais partie du bon, du beau du Net. Tournons la page ! Ne trouves-tu pas que ça commence à nous lasser ?
 
   Tu as remarqué que j’ai écrit beaucoup de poèmes d’amour. Je ne te cache rien, j’ai commencé à écrire suite à une histoire d’amour que j’ai vécue il y a plus d’une dizaine d’années. C’était un amour impossible, sans issue ; j’étais marié et elle était fiancée. J’étais très timide, je ne pouvais pas concurrencer mes collègues au travail qui étaient osés et vite arrivaient à faire des propositions aux filles. Et comme pour montrer ma force et simuler ma timidité, je m’attaquais inconsciemment aux filles dites difficiles avec lesquelles mes collègues ne pourraient avoir aucune chance. J’entamais un travail de fourmis, souterrain. Je ne mettais personne au courant de mes intentions. C’est ma vie privée, un tiers de mon existence, les deux autres tiers sont composés dans mon esprit de ma vie professionnelle et ma vie familiale. J’évite toujours que mes « trois vies » se mélangent, s’entremêlent. Il faut qu’elles aillent en parallèle. Cela me permet, en cas où surgissent des problèmes dans l’une, d’aller me réfugier dans l’autre, prendre un souffle. Le mal ne doit pas les contaminer toutes. Sinon je ne saurais où aller…Tu vois comme je m’égare ? Revenons ! Je choisissais donc le sentier le plus difficile qui mène au but le plus loin. Et tout cela pour neutraliser les concurrents et prendre tout mon temps à chercher les moyens pour me faire admirer. Pour séduire.
 
   Elle était blanche, pas très belle, très instruite, respectueuse et rien sur son visage ne montrait sa vie affective, sentimentale. Elle n’avait pas cette grâce féminine. Elle s’imposait là où il le faut mais se retirait discrètement quand elle se sent devenir dans le sujet de discussion une simple femelle.
 
   C’était une énigme. Et c’est à cette énigme que j’attaquai. Et sans armes. Je commençai à lui rendre visite dans son bureau presque tous les jours. Les premiers temps, je cherchais toujours une raison pour m’y rendre ; mais quand je constatai que le ciment prenait, je n’eus pas besoin de justifier mes visites. A la sortie du travail nous prenions le même bus, quand il y avait la bousculade il arrivait que nos mains ou une partie de nos corps se touchent. Le choc (car c’était un choc) me montait droit au cœur. Et comme une batterie rechargée ça me tenait un bon bout de temps. J’ai commencé à l’aimer sincèrement surtout pour son éducation et sa chasteté.
 
   Je repoussais brutalement l’idée d’avoir avec elle une relation physique. Il me semblait qu’une telle relation altèrerait mon amour que je sentais noble, et le rendrait ordinaire. Qu’est ce que je voulais au juste? Je ne sais pas. Elle avait une grande passion : lire la poésie. Quand elle me parlait de Baudelaire ( que je n’avais pas encore lu) elle était comme ivre de lui. Je me disais au fond de moi-même que si Baudelaire était vivant elle l’aurait certainement aimé. Une jalousie naquit en moi. Je commençais alors à lui écrire des petits poèmes. J’y exprimais mon amour pour elle mais d’une façon voilée voire hermétique. Je ne savais pas ce qu’elle pensait de mes écrits. Un jour elle me prêta « Spleen de Paris », un recueil de poèmes en prose de Baudelaire. Peut-être c’était une façon de me dire : « Tu es encore trop loin ». Non ! Elle voulait certainement m’intéresser à sa passion. J’ai lu le livre.
 
   Un autre amour se déclara en moi, celui de la littérature, la poésie. Un précieux outil … Je me surprenais en train de parler à haute voix à Baudelaire : « Oui, c’est ça… » lui disais-je quand il exprimait exactement ce que je ressentais. Et des gens extraordinaires, venaient à mon chevet s’enquérir de mon état : Hugo, Gide, Poe, et d’autres, inconnus mais qui détenaient de bons remèdes pour guérir mon mal. Le mal dont je ne voulais pas réellement guérir. Je relis « Les misérables », je découvris Gide en y pénétrant par « La porte étroite », je me laissai emporter par « Les histoires extraordinaires » d’Edgar Poe traduit par Baudelaire. J’étais souvent absent de l’endroit où je vivais réellement. Un jour, en sortant d’un café j’ai emporté avec moi le grand sucrier qui se trouvait sur la table sans m’en rendre compte…L’autre « moi », amusé, éclata de rire…
 
    Hé ! Tu es là? Je t’ai peut-être embêtée avec mes histoires. Mais laisse-moi te dire que depuis ce temps là, je n’ai jamais cessé d’aimer et exiger d’être aimé. Et chaque fois que mon cœur se lasse, je le remonte tel une montre pour qu’il recommence à aimer. Et chaque fois que je ne me sens plus aimé, je recours à l’arbre où il y a  le plus d’ombre. Le sens de l’amour n’est cependant plus l’attachement à une personne en tant que telle mais aux belles choses de la nature. La nature manifeste ses douceurs, ses délices, sa beauté dans la mer, dans le vent, dans la moue d’une fille, dans son regard, dans son allure, dans le feu nocturne…Le sommet du plaisir, l’extase ne sont pas le véritable bonheur pour moi. Le bonheur que nous devons savourer se trouve dans l’acheminement vers le but. Même si ce but s’avèrera après insaisissable.
 
   Je dois te quitter sans bruit, il fait tard, tu t’endors peut être. Il y a au moins une personne qui pense à toi en ce moment, elle est quelque part dans la nuit. Un enfant qui lève le doigt vers le ciel et s’écrie : « C’est mon étoile ».
 
   Merci de m’avoir permis de passer avec toi un moment si paisible et si doux dans mon jardin de rêves. Je ressors maintenant, avant de refermer la porte, je me retourne, contemple avec un sourire angélique sur les lèvres cette plante qui vient d’y pousser. Je crèverai le ciel pour qu’il pleuve sur elle et je creuserai la terre pour la nourrir de sa sève. Je créerai en elle le vouloir de fleurir et venir embaumer mes rêves….

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31 mai 2008 6 31 /05 /mai /2008 00:00

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21 mai 2008 3 21 /05 /mai /2008 00:00

Hier, après la disparition temporaire de dzblog, nous nous sommes sentis comme perdus; chacun cherchait à s'aggripper au groupe. Tant qu'il est temps, j'ai pensé à nous trouver un refuge en attendant que les choses s'améliorent. Un refuge où chacun de nous peut écrire et commenter. Je ne suis pas très fort en informatique, c'est pourquoi j'ai opté pour la simplicité. J'ai alors crée un groupe nommé Dzblog auquel chacun de nous peut adhérer en s'inscrivant en quelques minutes! on pourra ensuite améliorer l'apparence de ce groupe. je vous salue!!!!!!!!  Voici le lien:   http://www.blog.fr/group/dzblogg

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14 mai 2008 3 14 /05 /mai /2008 00:00

   Ecraser une fourmis ne me parait pas drôle. Mais passer un bon bout de temps à penser à l’arrêt brusque de l’existence de la minuscule bête, à l’anéantissement de ce corps animé me semble exagéré.

 

 
   Ne pas supporter les pleurs d’un enfant battu, la mort d’un brave laborieux dans la pauvreté, la cruauté de ceux qui sèment ça et là la tyrannie et s’approprient les libertés, la main tendue d’une femme sans ressources scrutant les visages des passants pour y déceler une pincée de pitié, la main d’un noyé, tremblante, atteinte jusqu’à l’abîme par l’indifférence…ne pas supporter cela pourrait être le sentiment éprouvé par beaucoup de gens. Mais me sentir un peu responsable de ce désordre et en souffrir m’est inadmissible.

 
   Il m’est possible de citer un tas d’exemples où je ne peux nier ma complicité alors que les faits se déroulent hors de ma portée.

 
   C’est pourquoi je m’invite parfois à un face-à-face avec moi-même. Je m’en sors toujours avec la même certitude : c’est la faute aux êtres humains et…j’en suis un. Je contribue donc à cet amalgame que tout le monde rejette…que je rejette. Je contribue en y mettant un peu de mon égoïsme, de ma jalousie, de mon hypocrisie. Et me trouvant face à face avec moi-même, je me vois comme une goutte de pluie, une toute petite goutte qui semble inoffensive mais qui donne en réalité la force au fleuve de déborder et dévorer les rives qui ne se lassent guère de reprendre confiance chaque fois que les eaux se retirent.

 
 Oui je suis complice même en ne causant aucun tort aux autres, car en évitant de nuire je me laisse faire et nourris de ma passiveté les appétits voraces.

 
   Mais que faire mon Dieu ? Une idée ! Pourquoi ne pas nous unir, gouttes que nous sommes, pour donner à ce monde un visage parfait ? Que je suis bête ! Pour que le monde soit parfait il faut…il faut…il faut qu’il soit imparfait ! 

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8 mai 2008 4 08 /05 /mai /2008 00:00

   Comme il y a des moments de folie dans le monde des sages, il y a des moments de sagesse dans le monde des fous. Si Zoubida est sage elle vit aujourd’hui ses moments de folie. Et si elle est folle elle vit aujourd’hui ses moments de sagesse. L’essentiel, zoubida d’aujourd’hui n’est plus celle d’hier.
   Parfois un simple incident, une rencontre hasardeuse peuvent être la cause d’un grand tournant dans notre existence. Il suffit d’échapper à la monotonie et se soustraire à l’habitude pour découvrir d’autres sentiers qui nous mèneraient vers d’autres contrées ; des endroits ailleurs ou en nous-mêmes, couverts par une brume où se mêlent notre ignorance et notre indifférence. Il suffit parfois de nous tromper de rue et toute notre vie se bouleverse.  C’est le cas de zoubida ce jour.
   Elle ne pense plus, aujourd’hui, à ses lettres bien enfouies dans son précieux coffre, car ce qui l’occupe s’était ancré en elle bien avant qu’elle commence à écrire. Elle ne ressent plus les douleurs de ses blessures suite à sa chute de l’autre nuit. Et pourtant, il y a quelque temps, elles lui faisaient si mal ; elle craignait qu’elles n’allaient pas vite se cicatriser, surtout la trace laissée par les griffes de Kabouya, ce chat qu’elle a toujours adoré ; rien d’étonnant, les plus douloureuses des blessures viennent de ceux que nous aimons le plus.
   Elle ne pense plus à la tentative de vol dont elle a été victime ces derniers jours, ni aux cauchemars qu’elle vivait presque chaque nuit. Et la mort tragique de Hamoud, qu’elle aima elle ne sait comment, a marqué la fin d’une période sur laquelle elle aurait passé l’éponge si le passé s’effaçait.  
     Aujourd’hui, Une autre plaie s’est ouverte en elle. S’est rouverte en elle. S’est ravivée.  Elle n’avait jamais cru qu’elle le reverrait un jour ; surtout ici, dans cette grande ville regorgeant d’anonymes. Elle l’a vu ce matin ; non loin de chez-elle, là bas en face dans le jardin, assis sur un banc, il tendait la main aux passants. Elle l’a même touché en lui donnant un billet de deux cents dinars. Elle a caressé un moment la main qui lui fut autrefois interdite. En empoignant le billet, il leva les yeux et commença à prier. Aucune prière n’égalerait pour Zoubida la douceur de ce regard redécouvert par hasard. Il ne la reconnut pas. Elle ne lui reprocha rien car ça fait bien un demi-siècle qu’ils ne se sont pas revus. Et même avant ils se voyaient rarement, les rencontres entre filles et garçons, après l’âge de la puberté, étant interdites dans leur village. En ces temps, les yeux parlaient pour dénoncer les interdits mais aussi pour déclarer les passions.
    Dans le brouhaha de la rue, elle reconnut sa voix. Il y avait encore cette résonance juvénile ; comme si on l’appelait de là bas, de son passé, de son adolescence. Elle revint sur ses pas, le dévisagea, redécouvrit Bakri, pas un brin de doute ne demeura en elle.  Sa solitude, surprise, comme jalouse, craignant une rivalité certaine, la tirait du bras pour l’éloigner de lui. Elle s’en éloigna. Elle avait besoin d’un moment de répit. Elle rentra vite à la maison en oubliant même d’acheter le ton pour Kabouya. Elle devait attendre Boualem pour le charger de la commission.
  Zoubida se plante à sa fenêtre. Il est encore là, tendant la main pour nourrir son ventre. Une main qu’il ne tendait autrefois que pour l’étreindre et alimenter son cœur. Elle ne veut maintenant  ni perdre de vue Bakri, ni trop s’approcher de lui ; une situation paradoxale. Elle n’arrive pas à se faire comprendre. A se comprendre.
     C’est avec lui qu’elle fugua toute jeune. Tout le village fut lâché à leurs trousses, il fut rattrapé et elle s’en échappa. Définitivement. Elle se jeta alors dans les bras du Destin qui la malmena un temps, puis vint un moment ou elle fut délivrée, elle ne sait comment, de son errance. A partir de ce jour elle commença à croire fermement à la chance. Elle vit actuellement dans l’aisance grâce à sa bonne pension et ses économies accumulées au cours de sa longue vie professionnelle.
    Enfin, Voilà quelqu’un qui donne l’aumône à Bakri. Le jardin d’en face commence à se vider, elle le distingue en ce moment, entrevoit même les traits de son visage, mais ceux d’autrefois. Elle les imagine. Elle se demande comment cet homme qu’elle avait tant aimé est devenu mendiant ; Pourtant il avait toutes les qualités pour réussir. Il a su autrefois acquérir son cœur pas à pas… Mais ce monde n’est pas juste sinon il serait un paradis.
    Voilà une femme qui donne l’aumône à Bakri. Zoubida refoule difficilement un sentiment de jalousie en voyant de loin, ou en croyant voir, la main de la bienfaitrice frôler celle du mendiant.
 Miaou ! Le chat réclame son repas, comme s’il avait pressenti la présence de Boualem devant la porte. Ça sonne ! Zoubida ouvre :
 -- Ah c’est toi Boualem, Je t’attendais !
-- Tu as besoin de moi, demande-t-il, l’air inquiet ?
-- Je vois que tu ne vas pas bien ?
-- Non, non, Je vais bien…
-- Tu vas acheter du ton pour Kabouya puis…
-- Quoi ?
-- Tu vois ce mendiant, là bas ? Tu vas lui donner cette nourriture.   
Boualem ressort, intrigué par le changement subite du comportement de Zoubida. Il se demande d’où lui vient soudainement cette générosité. Il doute même qu’elle joue la comédie pour l’apitoyer et lui tirer la langue, le faire parler du vol de l’autre jour. Le soupçonne-elle ? Il ne sait que répondre.
Après avoir acheté le ton, Il arrive maintenant  à proximité de Bakri, pose devant lui le sac de nourriture.
-- O merci mon fils !
-- Il faut manger vite, j’attends ici pour reprendre les assiettes.
-- Oui mon fils, je ne vais pas te retenir longtemps, j’ai une faim de loup, répond le mendiant en étalant devant lui un morceau de carton.
Boualem meuble son temps en contemplant les passants. Chahra, flamboyante, l’allure ferme, la poitrine élancée, le regard figé sur un rêve, surgit de l’autre coté du jardin public. Il se détourne, se dissimule ; il n’accepte pas qu’elle le trouve en une si mauvaise posture. Il entend ses pas s’approcher, s’approcher, son parfum l’envahit. Elle passe, le soulage. Il croit même voir un œil du mendiant se détacher et la suivre. Non, ce n’est qu’une illusion ; le vieil homme ne semble croire à aucun espoir ; il s’occupe plus de son ventre que de son cœur…
 -- Tiens ! mon fils, voici les assiettes ! Merci !
  Puis, il enchaine :
-- Vous n’avez pas une ancienne couverture à la maison ?
-- Pourquoi faire ?
-- Je vais passer la nuit ici, au jardin, et il fait froid…
-- Je vais voir Zoubida, dit Boualem en s’éloignant en courant.
-- Zoubida ! Zoubida ! se répète le mendiant en soupirant ; pourquoi mon enfant éveilles-tu mes souvenirs ?
 
Kabouya miaule ! Zoubida court la porte, Boualem est là.
-- Donne le ton ! Ma chère bête crève de faim !
-- Il a besoin d’une couverture.
-- Qui ? Le chat ?
-- Non, le mendiant ; il passera la nuit dans le jardin.
La vieille femme demeura un moment pensive puis lui demanda :
-- C’est toi qui lui as suggéré ça ?
-- Non ! Non !
-- Bon ! La monnaie, tu l’as gardée hein ?
-- Comme d’habitude, dit Boualem en souriant ; mes amis m’attendent, je dois partir…
Au moment où il allait sortir, elle l’interpelle d’une voix inhabituelle :
-- Tiens ! Donne-lui cette couverture.
 
    La nuit arrive ! Zoubida se remet à la fenêtre. Elle n’a rien préparé pour le diner. Elle n’a pas faim. Elle regarde de loin les ténèbres envahir Bakri, faisant de lui une masse sombre et sans contours. Parfois, il se confond au feuillage du jardin. Et parfois, l’éclair qui annonce un proche orage l’illumine. Quand elle baisse les yeux, c’est en elle que se poursuit la contemplation. Elle est ici seule dans le chaud, il est là bas seul dans le froid ! Ils voulaient de tout cœur s’unir quand ils avaient tout l’avenir devant eux ! Pourquoi ce désir ne se fait plus ressentir au moment où le risque de tout perdre n’est plus à courir. Ils sont déjà perdus. Ce désir ne se fait plus ressentir ? Zoubida doute, son cœur insensible depuis longtemps se révolte. Elle sourit en fixant les nuages. « Si nous n’avions pas eu la chance de commencer notre vie ensemble, pourquoi ne pas la finir ensemble ? »
   Elle ne sait pas pourquoi elle à peur aujourd’hui ; elle qui a toujours su trancher. La vie lui a tout appris ; elle devine les intentions des gens et leur crache sa franchise à la figure. Elle est restée seule mais libre. Elle ne sait pas pourquoi elle est gagnée maintenant par cette impuissance de décider ; doit-elle ramasser son ami d’enfance dont la vie se brise là-bas, dans la nuit ? Elle semble craindre la révolte de sa Solitude et la perte de sa liberté.
   Elle se retourne. Elle a senti comme si une main s’était posée sur son épaule. Et c’est en fermant les yeux qu’elle le voit. Bakri la tirait à lui dans leur refuge, la main de l’adolescent tenait la sienne, il lui demandait de retenir sa respiration pour ne pas attirer les chiens des gens qui les cherchaient.  Mais les chiens vinrent ; il les détourna, se sacrifia pour la sauver…
   L’obscurité s’intensifie, pénètre dans le jardin, se case partout, se répand sur les allées, enveloppe les troncs d’arbres, se faufile dans les feuillages, se moquant des faibles éclairages des réverbères aveuglés par la poussière. Il commence à tonner au loin, Zoubida regarde la silhouette de Bakri se déplacer tel un fantôme sous la lueur de l’éclair, afin de chercher comme autrefois un refuge, mais pour s’abriter cette fois de la pluie et du froid. « Et pourquoi ne pas l’abriter en le considérant comme étranger ? » se demande-t-elle ?
   Sa Solitude se tait comme apitoyée par un cœur qui n’a pas aussi bellement palpité depuis si longtemps, qui semble fredonner une étrange chanson et parler un curieux langage : Si les corps sont finis les âmes n’ont pas d’âge.  
   Zoubida aménage un lit au garage, une solution sage qui semble satisfaire tout en elle, et court pour amener Bakri avant que n’éclate l’orage.

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