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17 décembre 2006 7 17 /12 /décembre /2006 00:03

…Il abandonna alors cette idée pour aller chercher ailleurs. Quelques jours après une voisine lui fait remarquer l’étrange ressemblance entre Yatim et Zina, sa propre fille. Sa vraie fille. Un autre bout de son doute s’envola ! Et tout se dissipa quand la directrice de l’école, une ancienne collègue, lui fit connaître, suite au passage d’un groupe chargé des soins médicaux, l’appartenance des deux enfants au même groupe sanguin. « Ce n’est pas des coïncidences, pensa-t-il ; il n’y a plus de doute ! Yatim est bien mon fils».
 
Il n’y a plus de nuages, le ciel est clair, Hamou se déplace, encore une fois, à l’autre bout du balcon pour se mettre directement sous les rayons du soleil doux de cette fin d’automne. Là, juste au dessous monte la fumée du mégot qu’il vient de jeter, la fumée allait à gauche, à droite…comme s’il elle était perdue ; elle prend tranquillement sa place dans le tableau qui s’étale là-bas et qui avale, comme une éponge géante, les traces des gens qui passent. Hamou ne fume pas beaucoup ces derniers temps, une méchante toux l’oblige à observer un certain régime, et puis, sa femme ne supporte plus l’odeur du tabac. Il allume quand même une autre cigarette, ce qui l’aide à méditer sur les mesures à entreprendre en ces moments exceptionnels. Fort de sa certitude, il cherche comment assumer sa responsabilité de père. Peut-il agir sans défaire l’autre couple ? Sans achever sa femme qui lutte contre sa maladie ? Il se pose ces questions …se les repose ! La réponse ne monte pas, demeure en lui, tout au fond de lui, lourde…lourde de conséquences ! Et s’il se trompe ? Il a besoin d’un autre doute pour prolonger son immobilisme mais la réalité est si frappante qu’il ne trouve aucun coin d’ombre pour se réfugier et observer un répit. Il décide alors, en attendant de faire mieux, de veiller sur son enfant sans éveiller les soupçons ; le suivre à l’école, se retrouver souvent sur son chemin, lui tenir la main et lui demander s’il n’a besoin de rien ; l’inviter chez lui, créer une amitié entre Yatim et Zina, les regarder jouer ensemble…se sentir planer, atteindre de ses deux ailes des horizons opposés. Au nom de cette amitié il pourra faire, sans attirer les attentions, plein de cadeaux à son garçon à l’occasion des fêtes. Il arrivera à parler en douceur à la mère, implorera son pardon, la suppliera d’accepter leur destin et se garder d’entraver son cours, et le priver ainsi du bonheur qu’il éprouve en compagnie de leur enfant…il agira donc de cette façon en attendant de faire mieux, d’entendre « papa » d’une voix masculine qui portera son nom ou du moins son sang dans les générations futures…
 
Demain, il ira de bon matin à l’école pour voir son fils jouer dans la cour. Demain, il se mettra sur le chemin de la mère de son enfant ; il fera semblant d’être là par pur hasard et lui arrachera un gentil salut. Il regardera, demain, le soleil se lever sans un brin de doute en lui ; il chassera d’un geste machinal de la main, comme des mouches, les idées qui oseront poser leurs sales pattes sur…sa certitude.
Les gémissements de sa femme le tire de ses rêveries. Il la rejoint, c’est le moment de lui administrer ses médicaments. Elle repousse les comprimés en lui disant, pleine de courage, souriante même malgré les larmes qui ruissellent paresseusement, comme manquant de pente, sur ses joues: « Je crois que je vais bientôt finir ». Elle le fixe un moment, son visage s’assombrit, elle ajoute:« tu sais…je crois que je mérite cette souffrance mais je ne veux pas qu’elle m’accompagne encore dans ma tombe, promets-moi de prendre soin de ma fille ! ». Hamou l’assure en lui caressant le front en s’efforçant d’être naturel : « tu vas guérir, tu es encore jeune…et puis n’oublie pas qu’elle est aussi ma fille ! ». Elle ferme les yeux et lui avoue avec un courage que ne peut avoir qu’un partant pour l’au-delà : « Pardonne-moi Hamou ! Je ne pouvais rien dire avant…je craignais de te perdre…ça me torture depuis des années, sache que Zina n’est pas de toi ! Zina n’est pas ta fille!».
 Un silence. Un néant. Il sent le front de sa femme se refroidir sous sa main, tout semble mourir en lui.  

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commentaires

B
ha quelle fin. !!!!!<br /> Quelle feinte!!!!<br /> Comme au foot, un drible qui vous laisse assis sur votre derriere.<br /> Admirable pour la trame, admirable aussi pour l'écriture!!!!
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