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4 novembre 2006 6 04 /11 /novembre /2006 00:03

Chère amie !

 

 

 

      Je m’excuse, chère amie, d’avoir un peu retardé ma réponse à ta lettre. Je t’avoue que je ne pouvais pas t’écrire ; beaucoup de choses se précipitaient au bout de ma plume…Beaucoup de choses voulaient s’exprimer, et tu aurais reçu un méli-mélo de pensées et de sentiments dictés par une subjectivité qui avait envahi un moment ma personne. Il avait fallu que je me taise. Et je me suis tu. J’ai donné le temps à cette mer houleuse qui se déchaînait en moi de se calmer. Elle se calma. La lune qui montait tous les jours et l’agitait s’était absentée. Et combien j’avais souhaité avoir un bras infiniment long qui irait au de là de l’horizon pour soustraire l’astre à ce qui l’emprisonne…L’obscurité que fit naître cette absence se resserrait sur moi jusqu’à me faire pénétrer en moi-même. L’extérieur devint invisible. Et même si je pouvais le voir je n’aurai pas risqué un coup d’œil ; je savais qu’allaient me heurter le vide et la fadeur. Mais voyons, Henia, c’est ce genre de choses que je ne voulais pas t’écrire et voilà que je me surprends en train te les dire. Passons donc !

 

 

 

    La décision que tu as prise est sage quoiqu'un peu brusque. Nous aurions dû discuter ensemble sur ce sujet et décider de cela dans le calme. Ça ne fait rien ! Je reconnais que tu as plus que moi le courage de faire des choix. Tu avais raison, nous ne pouvions pas continuer longtemps au rythme où nous allions. L’épuisement venait…Ce rythme nous a été imposé par nos vouloirs de nous connaître plus, de nous rapprocher, chacun de nous voyait poindre à l'horizon de son désert  un oasis. Et chacun de nous souffrait parce qu’il était certain que c’était un mirage. Nous avions en nous cette crainte que nous tentions d’ignorer et qui revenait à chaque silence nous rappeler l’inexistence de l’issue d’un chemin qui ne mène nulle part. Je crois que ce « vent de folie » qui a fait que nous nous agrippons l’un à l’autre de crainte d’être emportés n’est en réalité que l’expression naturelle de l’humanité en nous. Je ne vois guère en cela un moment de faiblesse ni n’y éprouve quelque bassesse, car ce n’est pas le désir qui nous attirait l’un vers l’autre. C’est ce monde que nous laissions derrière nous qui ne nous comprenait pas, nous pourchassait, et nous courrions l’un vers l’autre, nous nous réfugions l’un dans l’autre.

 

 

 

      Le geste qui nous a unis un moment n’est que noblesse, cesse de t’abandonner aux regrets et aux remords. Personne sur terre n’aurait pu nous offrir ce que nous nous sommes offert.

 

 

 

    Tu as décidé, Henia, de nous plus aller sur le « chat ». Tu as tort, chère amie ! Pourquoi te prives-tu de tes amis à cause de moi ? Est-ce raisonnable ? Retrouve alors ton activité dans le « room ». Amuse-toi ! Je ne serai jamais là ! Ou si par besoin je désire assister aux discussions je le ferai sous un autre pseudonyme. Vas-y donc, retrouve tes amis ! Je crois cependant qu’il n’est pas conseillé de se connecter longtemps, cela deviendra une passion qui échappe à la volonté.

 

 

 

   Ne t’inquiète pas pour moi, Henia ! Je saurai être ton ami, et comme tu l’as souhaité, je limiterai ma relation avec toi aux é-mails, ils s’espaceront peut être avec le temps mais nous resterons en contact, nous nous écrirons sur divers sujets. Tu me donneras ton avis sur mon manuscrit quand il te parviendra.

 

 

 

   Ne t’inquiète pas pour moi, Henia ! Je saurai dépasser cette période qui, je l’avoue, n’est guère facile pour moi. Mais tu me connais un peu, je ferai de cette souffrance une douceur dont je m’enivrerai et de ce fait je pourrai atténuer ma douleur. Tu es une personne très admirable pour moi, durant ce mois de rencontre qui en  équivaut en réalité à plusieurs je suis comme habité par toi et tu y demeures encore. Tu resteras en moi, avec cependant ce handicap de ne pouvoir le dire à personne. Je te porterai en silence. Les gens ne sauront pas le secret de cet air qu’a pris mon regard, ni ne te voient lorsque tu te dessines sur mes lèvres quand j’esquisse un sourire.

 

 

 

    Je saurai dépasser cette épreuve mais me manquera la tendre Hénia qui me chatouilla de son haleine; me manquera la Hénia droite et catégorique qui maintes fois me fît trembler, me manquera surtout la gamine qui me tendait la main pour lui faire traverser la route, et qui combien de fois me fît pleurer, comment supporter que l’enfant retourne à son hibernation et genoux au menton, telle un fœtus  qui mettra peut être beaucoup de temps pour naître… Renaître.

 

 

 

    Sache, Henia, tu es toujours la même pour moi, je respecte ta volonté, qui est la mienne d’ailleurs, de rester amis et pas « autre chose » ; quoique le vin ne peut jamais redevenir raisin. Je t’admire, je ne crois pas que je rencontrerai une personne comme toi. Et je te remercie pour le respect et l’amitié dont tu n’as cessé de me témoigner. Je m’excuse enfin de t’avoir écrit cette lettre avec mon cœur…je l’ai fait parce que j’ai remarqué qu’il résonnait et qu’il allait savoir raisonner. J’ai confiance en lui. Et en toi, Henia.

 

 

 

    J’ai reçu ta deuxième lettre, j’ai eu subitement honte de n’avoir répondu à temps à la première. Et je me suis rendu compte combien tu me supportes.

 

 

 

  Prochainement, j’irai au Douar passer quelques jours. Je vais assister à une fête, je serai entouré des gens de ma famille ça me réconfortera certes mais pas au point de me tirer de toute ma solitude. Je me promènerai dans le jardin des orangers et j’évoquerai, un sourire sur la bouche, cette histoire de l’explorateur des trésors de la Sibérie. Pris de froid la nuit, il avait allumé au pied d’un mont un petit feu pour se réchauffer ; gagné par le sommeil il s’endormit oubliant de l’éteindre. Le feu fut ravivé par le vent de minuit qui soufflait et provoqua une avalanche de glace qui ensevelit l’infortuné explorateur. Il est en train de se débattre pour sauver sa pauvre âme. Je t’écrirai quand je retournerai de là-bas, avec plus de raison, comme tu as su le faire. Je te parlerai du manuscrit que je t’ai envoyé et qui mettra peut être plus de temps que tu ne le crois avant de te parvenir. Il y a trop de lenteur chez nous qui nous fait que nous enfoncer…et trop de chaleur en ce trois juillet…

 

 

 

Enfin, Je te félicite pour tes succès dans le travail et te souhaite tout le bien du monde.

 

 

 

                                                                                       Amicalement.   

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